Lyrics:

A l'enseigne de la fille sans cœur

1951

Paroles et Musique: Jean Villard

Le ciel est bleu, le vent du large creuse la mer bien joliment.
Vers le port, montant a la charge, Galopent seize escadrons blancs.
C'est un port tout au bord du monde dont les rues s'ouvrent sur l'infini
Mais de la, comme la terre est ronde, on ne voit pas les États-Unis.

Tout le monde s'en fout, 'y a du bonheur, 'y a un bar chez Rita la blonde.
Tout le monde s'en fout, 'y a du bonheur a l'enseigne de la Fille Sans Cour !
L'accordéon joue en majeur les refrains de ce vaste monde.
'y a la belle blonde, cette rose en fleur, a l'enseigne de la Fille Sans Cour.

Dans ce petit bar, c'est la qu'elle regne. On voit flamber sa toison d'or.
Sa bouche est comme un fruit qui saigne. Mais on dit que son cour est mort.
Pourtant les gars sont la, tout drôles : Les p'tits, les durs, les malabars.
Qui entrent en roulant des épaules 'y en a qui sont venus d'Dakar.

'y en a d'Anvers, 'y en a d'Honfleur, Bourlinguant parfois jusqu'aux pôles.
Ils la regardent, c'est tout leur bonheur, mais pas un ne connaît ses faveurs.
L'accordéon joue en majeur tous les airs : les tristes, les drôles...
'y a des gars qui jouent leur bonheur a l'enseigne de la Fille Sans Cour.

Le patron connaissait la musique : Il aimait le son des écus.
Il disait a sa fille unique : 'Fuis l'amour, c'est du temps perdu !'
Mais un soir, la mer faisait rage... On vit entrer un étranger
Aux beaux yeux d'azur sans nuages. C'est alors que tout a changé...

Il a regardé la fille sans cour. Elle était comme un ciel d'orage.
Quelqu'un a fait : 'y a un malheur'. On entendait battre les cours.
L'accordéon joue en mineur. Un refrain dans le vent sauvage.
'y a une fille, le visage en pleurs, a l'enseigne de la Fille Sans Cour.

Il a dit : 'C'est toi, ma divine !' Elle répondit : 'Je suis a toi...'
Il l'a serrée sur sa poitrine. Elle a pleuré entre ses bras.
Les autres alors, mélancoliques, sont partis avec un soupir...
Le vent chantait sur l'Atlantique. Pour ce cour qui venait de s'ouvrir.

Ils ont filé vers leur grand bonheur. Le patron dut fermer boutique.
On l'a vu boire toutes ses liqueurs. A l'enseigne de la Fille Sans Cour,
Oui, mais l'État, cet accapareur, qu'a toujours le sens du comique
A mis le bureau du Percepteur A l'enseigne de la Fille Sans Cour...