Le colonel était dans la finance Le commandant dans l'industrie Le capitaine était dans l'assurance Et le lieutenant était dans l'épicerie Le juteux était huissier de la Banque de France Le sergent était boulanger-pâtissier Le caporal était dans l'ignorance Et le deuxième classe était rentier !
Et tout ça, ça fait D'excellents Français D'excellents soldats Qui marchent au pas Ils n'en avaient plus l'habitude Mais c'est comme la bicyclette, ça s'oublie pas !
Et tout ces gaillards Qui pour la plupart Ont des gosses qui ont leur certificat d'études Oui, tous ces braves gens Sont partis chicment Pour faire tout comme jadis Ce que leurs pères ont fait pour leurs fils
Le colonel avait de l'albumine Le commandant souffrait du gros côlon La capitaine avait bien mauvaise mine Et le lieutenant avait des ganglions Le juteux souffrait de coliques néphrétiques Le sergent avait le polype atrophié La caporal un coryza chronique Et le deuxième classe des cors aux pieds
Et tout ça, ça fait D'excellents Français D'excellents soldats Qui marchent au pas Oubliant dans cette aventure Qu'ils étaient douillets, fragiles et délicats
Et tout ces gaillards Qui pour la plupart Prenaient des cachets, des gouttes et des mixtures Les voilà bien portants Tout comme à 20 ans D'où vient ce miracle-là ? Mais du pinard et du tabac !
Le colonel était de l'Action française Le commandant était un modéré Le capitaine était pour le diocèse Et le lieutenant boulottait du curé Le juteux était un fervent extrémiste Le sergent un socialiste convaincu Le caporal inscrit sur toutes les listes Et le deuxième classe au PMU !
Et tout ça, ça fait D'excellents Français D'excellents soldats Qui marchent au pas En pensant que la République C'est encore le meilleur régime ici-bas
Et tout ces gaillards Qui pour la plupart N'étaient pas du même avis en politique Les voilà tous d'accord Quel que soit leur sort Ils désirent tous désormais Qu'on nous foute une bonne fois la paix !