Mon piano a cent ans Il est chargé d'histoire Et parfois tout ce temps Me revient en mémoire Comme s'il restait encore Des morceaux de sa vie Prisonniers des accords Et des notes endormies Les bonheurs et les joies Les douleurs et les peines Les âmes d'autrefois Avant qu'elles ne s'éteignent Avant qu'elle ne m'étreignent Et qu'elles résonnent en moi Quand l'ivoire et l'ébène S'accordent sous mes doigts
Dans le salon désert Du fond du canapé Je regardais ma mère s'installer au clavier Quand ses mains voltigeaient Comme un oiseau sans cage Je sentais qu'elle m'offrait son amour en partage Me voit-elle à présent Veiller dans la maison Et m'asseoir sur le banc Pour finir ma chanson
Mon piano a cent ans Il a vécu l'enfer Et les années perdues De silence et de guerre Un soldat disparu Une vie qui s'éteint Le bonheur éperdu D'un amour qui revient Pour deux amants sereins Qui s'aiment à la folie Et rêvent à quatre mains Du reste de leurs vies
Mon piano a cent ans Il s'est chargé d'espoir Sous mes doigts débutants Qui découvraient Mozart Les enfants du passé Qui ont, tout comme moi, Caressé son clavier Pour y chercher leur voix Aujourd'hui j'ai envie de franchir le miroir D'allumer des bougies Pour éclairer l'histoire Ecouter dans la nuit Sous l'ébène et l'ivoire Les morceaux de nos vies Retrouver la mémoire Alors dans la lumière Et au fond des regards Mon piano centenaire Illumine le soir