La cinquantaine ben sonnée Au propre comme au figuré Normand est affalé su’l'plancher Yves qui a encaissé la droite Est encore deboute sur ses pattes Mais aujourd’hui y fait moins son smatte Faut dire qu’ils l’ont pas vu v’nir Ce coup parti sans avertir Qui est venu knocker leur av'nir Quand y z’ont appris la nouvelle La shop qui ferme c’est sans appel Ils sont sortis d’l’usine le cul su’a pelle
Shooters ! Pour les nouveaux chômeurs Shooters ! Pour les bons travailleurs Shooters ! Apporte toute la bouteille Qu’on s’nèye... Donne-nous à boire Saint Ciboire ! À soir on a les idées noires !
Normand qui est ben déprimé Vient d’voir sa retraite s’envoler Comme son mariage y a six mois passés 'Quand t’as donné trente ans d’ta vie À une femme et une compagnie T’as l’feeling d’être cocu en esti' 'Comment tu veux te r‘placer Rendu à cinquante ans passés Quand ton expérience est ton seul papier ?' Y a eu sa montre en or plaqué Sa prime de r’traite anticipée Pis y ont dit : 'Va vider ton casier !'
Shooters ! Pour les nouveaux chômeurs Shooters ! Pour les bons travailleurs Shooters ! Apporte toute la bouteille Qu’on s’nèye... Donne-nous à boire Saint Ciboire ! À soir on a les idées noires !
Yves qui est mauditement paqueté Aime mieux voir ça du bon côté Y s’dit : 'Mieux vaut en rire que d’en crever Normand moi ch’pas plus avancé J’viens de tout réhypotéquer À cause d’l’hostie d’cuisine à rénover Quarante cinq mille piastres de moulûres D’armoires pis de plâtre sur les murs À c’prix là est mieux d’être belle la peinture Surtout qu’j’aurai l’temps d’la r’garder Pis qu’tous les jours elle va m’rappeler Qu’j’ai pu une maudite cenne pour payer'
Shooters ! Pour les nouveaux chômeurs Shooters ! Pour les bons travailleurs Shooters ! Apporte toute la bouteille Qu’on s’nèye... Donne-nous à boire Saint Ciboire ! À soir on a les idées noires !
Adieu les projets de retraite Le chalet vient d'passer tout drette J’viens juste de l’voir s’pousser avec ses raquettes Après trente ans à faire l’ouvrage J’pensais pas qu’on tournerait la page En s’roulant la yeule au bar du Portage
Un jour y arrivent, y nous engagent Pis on embarque dans l’engrenage Comme des robots su’ la ligne de montage Y viennent icitte faire leu’ profit Pis quand tout devient décrépit Y filent à l’anglaise aux Etats-Unis Ok les boys dernier service C’est la dernière que j’vous dévisse Et pour le reste que le ciel vous bénisse Demain y s'ra dur le réveil Sûrement le pire des lend’mains d’veille Mais pour à soir c’est la maison qui paye…
Quand t'es certain d'être le perdant Y a pas de paix, y a pas de guerre Au revoir mon père Au revoir mes frères Je m'en vais avec mon coeur battant Fouler la terre Braver l'hiver Oh, oh, oh, oh, oh, oh
Quand l'expérience n'est que du vent Pour l'étranger mercenaire Tu prends l'allée par en avant Y a aucun sens à la misère Au revoir mon père Au revoir mes frères Je m'en vais avec mon coeur battant